Assassin's Apprentice (Farseer T. 1), de Robin Hobb

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Ma première relecture

Il est plutôt rare que je relise un livre que j'ai déjà lu. J'ai essayé quelques fois, mais même après plusieurs années, mon souvenir est tellement détaillé que je m'ennuie en lisant. Évidemment, je ne me souviens pas exactement de tout, mais il me manque tellement peu, et j'avance tellement lentement, que ça ne m'intéresse pas et j'arrête rapidement.

Je m'attendais plus ou moins à ce que la même chose arrive avec Assassin's Apprentice de Robin Hobb (que j'ai lu en version original, sa traduction française chez Pygmalion est L'apprenti assassin).

Cependant ma première lecture, en 2009, a lieu pendant une période assez particulière de ma vie. J'étais au plus mal après une rupture terrible, et juste après la perte du seul appui local qu'il me restait, et avant que je recommence à prendre pied. Pendant ce moment terrible, il y a eu en plus une semaine de congés forcés, où je n'avais même plus le travail comme prétexte pour maintenir une façade. Je suis loin d'en être fière, mais pendant cette grosse semaine, je n'ai fait que pleurer, dormir, me saouler et lire. Et j'ai lu ce livre. Un livre en une semaine, c'est un record personnel.

Ce livre fait partie des histoires auxquelles j'accroche tellement que je n'arrive pas à rassembler toute seule assez de volonté pour revenir à la réalité. Et quand un élément extérieur y parviens, je reste pendant assez longtemps dans un état zombi, sortie du livre mais sans avoir vraiment réintégré la réalité. Du coup sachant ça, je fais en sorte de n'en sortir que pour dormir, pour pouvoir réintégrer sereinement la réalité au réveil.

Malgré la barrière linguistique de la version originale, ce livre a donc été une évasion parfaite pour une période très sombre de ma vie. Mais l'intensité de la lecture, et peut-être aussi les autres évasions auxquelles je m'adonnais alors, ont privé ma mémoire de pans entiers de l'histoire.

Il me semble donc que c'est que la première fois que je réussis à relire entièrement un roman. Et je ne sais pas trop dans quelle mesure ce haut-fait peut être réitéré.

Pendant cette lecture, il m'est plusieurs fois arrivé de me souvenir de conséquences de la résolution de la scène en cours, sans arriver à retrouver quoi que ce soit quant à la résolution elle-même. Ça ajoute une forme de suspense inattendu mais aussi assez agréable que du suspense traditionnel.

Sur la fin, ça a pris un tour encore plus intense, quand je n'arrivais plus à retrouver les conséquences de la situation que je venais de lire, et je n'arrivais même pas à déterminer si j'avais oublié ces conséquences ou si elle ne faisaient pas partie du livre.

J'ai ainsi connu des moments d'impatience tels que je sautais un paragraphe pour voir la suite, et me rendre compte que je n'arrivais pas à faire le lien avec ce que j'avais lu juste avant. Je revenais donc en arrière pour lire le paragraphe sauté. Et parfois avant même d'avoir fini ce paragraphe sauté je ne pouvais m'empêcher de sauter encore plus loin, mais encore sans réussir à « raccrocher les wagons », et livrer une bataille à moi-même pour revenir en arrière et vraiment tout lire.

Ce que j'ai adoré

J'imagine qu'il y a une multitude de résumés disponibles sur le web, et probablement plusieurs qui sont beaucoup mieux que tout ce que je serais capable de faire.

Dans le principe, sans spoiler, c'est l'histoire d'un bâtard royal qui échange sa survie contre un service inconditionnel au roi, en tant qu'assassin, mais aussi espion et autres black ops. Ce livre part de ses premiers souvenirs, et se termine à la fin de sa première grosse mission, en se focalisant surtout sur son apprentissage et toutes les intrigues de la cour vues par un gamin (dès le début du tome suivant, il ne sera plus considéré comme un gamin in par la cour ni par lui-même).

Comme je l'ai déjà écrit plusieurs fois dans mes critiques, j'aime beaucoup les histoires « tranches de vie », où tout ce qui arrive à un personnage est décrit (avec plus ou moins de détail) de façon tellement complète que l'on pourrait dresser son emploi du temps sans laisser de trous. Et ce par oppositions aux histoires que je trouve plus simplistes, où n'est décrit que les évènements pertinents pour l'intrigue principale.

Il me semble avoir déjà aussi écrit que j'aime beaucoup avoir l'impression que le monde est bien plus vaste et détaillé que ce qui est décrit dans l'histoire. C'est le cas ici, et de façon aussi flagrante que possible : des évènements politiques majeurs se produisent, avec des conséquences énormes pour tout le royaume, mais ce n'est qu'une trame de fond, et les petits évènements du quotidien du narrateur et les petites intrigues qui le concernent on largement le dessus.

Un autre point qui participe probablement à mon aspiration dans cette histoire est la facilité de projection dans la situation du personnage principal. Comme la section 9 de Ghost in the Shell (que j'adore également), le personnage principal est formé pour faire partie d'un groupe d'élite, ou plus exactement en l'occurrence, être à lui tout seul tout le service black ops du roi. Et je dois avouer que ça me chatouille agréablement, parce que c'est ce que j'adorerais vivre. Je sens qu'en m'y mettant à fond je pourrais faire partie d'un tel groupe, et je pourrais m'y épanouir en repoussant mes limites. Et c'est exactement ce qui me manque le plus cruellement dans ma situation professionnelle, que je fuyais justement dans cette histoire.

Enfin il y a un autre élément majeur qui me plaît beaucoup, mais j'ai un peu de mal à le formuler. Je crois que c'est la façon dont est décrit le tissu humain qu'est la cour, ou plutôt les gens interagissent avec le personnage principal. Ou peut-être est-ce que tvtropes décrit comme des « thèmes politques ». Enfin c'est quelque chose qui a à voir avec les mécanismes de certaines relations humaines et la façon dont ils sont décrits et expliqués. Ou quelque chose comme ça.

Je ne sais pas si ça a un rapport avec mon intérêt plutôt récent pour la chose vie politique (du monde réel), ou pour ma soif de compréhension des relations humains qui m'échappent encore beaucoup trop à mon goût. Dans les deux cas, je doute que cette histoire m'apporte quoi que ce soit.

Conclusion

Je n'ai pas fait de partie « Ce que je n'ai pas aimé », parce que je n'ai rien trouvé à y mettre.

J'ai éprouvé beaucoup de sentiments négatifs en lisant ce livre, mais c'était à chaque fois la répercussion d'actions odieuses envers ma projection dans le personnage principal, ou parfois dans un personnage secondaire. Et ça c'est exactement ce que j'attends d'une histoire tellement prenante, donc je le compte comme un sentiment positif vis-à-vis de la lecture elle-même.

J'imagine qu'il y a un seuil de saturation pour ce genre de sentiments négatifs projetés, seuil que j'ai atteint en regardant les premiers épisodes de la série The Wire. Ce livre est largement en dessous de ce seuil.

Avec tellement de points largement positif, et mon incapacité à lui trouver du négatif, ce livre ne peut que rentrer dans le panthéon des histoires pour lesquelles j'ai une adoration ultime.

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  • Publié le 11 juin 2012 à 18h48
  • Dernière modification le 17 juin 2012 à 15h24

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