03. Porté disparu

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— C'est pour ça que vous vouliez me voir ?

— Oui. C'était ses instructions…

— Qu'est-ce qui lui est arrivé ?

— Je ne sais pas. J'ai juste reçu ça…

Deux-Gardes sort un papier de sa veste et le déplie fébrilement avant de me le tendre.

— Ça dit quoi ?

— Ah oui, pardon. Heu… c'est un message automatique, que j'ai reçu hier soir. On n'a pas reçu de signal de la puce biométrique de Lone depuis cinq jours. Je suis censé prendre les mesures prévues.

— Donc il est peut-être encore vivant ?

— On ne sait pas. La puce est censée le signaler s'il meurt. Et si la puce a un problème, cinq jours ça suffit largement pour s'en rendre compte et la changer, ou au moins donner un autre signe de vie s'il ne peut pas la changer tout de suite.

— Donc c'est la merde et on ne sait pas ce qu'il se passe.

— Voilà.

— Et c'était quoi les « mesures prévues » ? Venir m'annoncer la nouvelle ?

— Voilà. Enfin, pas seulement… Il m'a confié un bloc de données, à vous remettre si quelque chose comme ça arrivait.

— À moi, spécifiquement ?

— Oui, à vous et personne d'autre. Il y a un deuxième bloc de données, à vous remettre aussi, que j'ai pris ce matin dans le coffre-fort de son bureau. Le coffre a dû être débloqué automatiquement par le même signal.

— Deux blocs de données, c'est tout ?

— Oui. À ne remettre à personne d'autre que vous, essayer de le faire discrètement par tous les moyens possibles, et si je n'y arriverais vraiment pas, je devais les détruire.

— Wahou. Et y a quoi dessus ?

— Je ne sais pas, je n'ai pas regardé.

Est-ce que les gens se rendent compte à quel point leur voix les trahit si facilement ?

— Y a quoi sur ces blocs de données ?

— Je n'étais pas censé regarder leur contenu, seulement vous les remettre.

À quoi bon pousser autant les technologies de protection lorsque l'humain reste un maillon si faible ?

— Vous n'avez pas résisté à la curiosité. Qu'y a-t-il sur ces blocs ?

Il soupire.

— Je ne sais pas. J'ai regardé, c'est vrai, mais c'est chiffré, et il n'y a pas d'en-tête pour savoir de quoi il s'agit, c'est directement le chiffre. Ou alors c'est des données aléatoires, et les trucs intéressants sont ailleurs. Ou alors c'est du gros n'importe quoi pour faire une mauvaise blague.

— Ce n'est pas le genre de Ludo.

— Je sais, mais à ce stade, je ne peux rien en dire de plus. Comme ce n'était prévu que pour vous, il doit falloir votre clé, ou un mot de passe commun, ou quelque chose comme ça, pour en extraire le sens.

— Je vois. Il vous faisait confiance ?

— Plutôt, oui. Sinon il ne m'aurait pas confié cette tâche.

— Mais le contenu de ses clés n'est pas pour vous ?

— Apparemment non. Je suis aussi largué que vous. À mon avis, il ne m'aurait pas confié d'informations. Pas à cause de la confiance, à cause du danger.

— Du danger ?

— N'importe quelle fouineur peut facilement trouver un lien entre Lone et moi. Si Lone s'est fait éliminer, et qu'on partageait la moindre info', je serais le prochain sur la liste. Et même là, c'est pas dit que je sois épargné.

— Et moi ?

— Bienvenue dans la merde. Bon, on ne fait que discuter, les capacités humaines sont limitées, et de toute façon vous n'aurez rien de solide. Ils vous laisseront peut-être tranquille.

— « Ils » ?

— Je ne sais pas. Y a peut-être personne qui a fait le moindre mal à Lone. Y a peut-être eu juste un accident. Et s'il a été descendu, je ne sais vraiment pas par qui.

— Aucune idée de son dernier dossier ?

— Aucune. Et là c'est la vérité.

— Je vous crois.

— Dans ce milieu, on bosse en solitaire, y a déjà assez de gâchis collatéral comme ça.

— Et les blocs de données ?

— Je les ai laissés dans le casier 22. Le rouge, heu pardon, je veux dire, celui qui est plutôt long, c'est celui qu'il m'a confié il y une dizaine de mois. Celui qui est plutôt court et plat, c'est celui qui était dans son bureau ce matin.

— D'accord.

— Je vous conseille de ne pas les chercher vous-même. Envoyez quelqu'un de confiance, mais pas trop évidemment proche. Un habitué du retcon, de préférence. Et pas tout de suite. Genre demain matin ou midi. Au cas où.

— À ce point là ?

— C'est juste un conseil, vous en faites de ce que vous voulez. J'ai loué le casier pour quarante-huit heures. Vous savez où sont les données, je vous ai dit tout ce que je sais, j'ai rempli ma mission, après vous faites ce que vous voulez, ce n'est plus mon problème.

— Je vois. Il fouillait vraiment dans des coins aussi dangereux…

— Vous n'imaginez pas. Je ne suis même pas sûr que tout ça suffise, mais on ne peut pas faire plus.

— Et vous ne savez vraiment rien sur ce qu'il mijotait ces temps-ci ?

— Rien de rien. Je sais juste qu'il est sur un gros coup depuis un bon mois, il était assez excité.

— Et ben voilà.

— Je ne sais vraiment rien de plus.

— Je comprends…

Je laisse le silence s'installer quelques instants, le temps de tout recompter et encaisser.

— Et maintenant, qu'est-ce que vous allez faire ?

— Si vous n'avez pas de meilleure idée, demain j'irai le déclarer officiellement « porté disparu » à la police. Des fois qu'ils puissent faire quelque chose…

— C'est tout ?

— À part prier pour qu'il finisse par s'en sortir sain et sauf, je ne vois pas ce que je peux faire. Il va me falloir quelques semaines pour encaisser sa disparition, et s'il n'est pas réapparu entretemps, je le pleurerai peut-être un peu, et puis la vie continue…

— Je ne vous tiens pas au courant de ce que je trouverai sur les blocs ?

— Non. Oubliez-moi. Ça vaut mieux pour tout le monde, croyez-moi.

À suivre…

Commentaires

1. Le dimanche 9 août 2009 à 18:06, par Schmurtz :

Youpi, l'épisode suivant est sorti ! Aller, je reprends ma patience pour attendre le prochain.

2. Le dimanche 9 août 2009 à 20:58, par Natacha :

Je suis contente de voir que mes écrits sont assez intéressants pour justifier la patience d'attendre les morceaux qui arrivent au compte-goutte \o/

Je fais ce que je peux pour fournir une histoire aussi continument que possible, mais ce n'est qu'un loisir qui ne peut décemment pas envahir tout mon emploi du temps.

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  • Publié le 8 août 2009 à 14h56
  • Dernière modification le 19 janvier 2010 à 20h49
  • 1086 mots
  • 2 commentaire(s)

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