99 frames

Il y a quelques jours, ma 99ᵉ entrée dans 52frames a été publiée, et il me semble qu'il en temps d'en dresser un bilan.

D'accord, les bilans c'est quelque chose qui se fait traditionnellement plutôt dans les comptes ronds, comme la centième entrée ou le deuxième anniversaire, alors que finalement être au bord de l'ajout d'un chiffre ça pourrait être tout aussi significatif.

Il est de fait qu'une partie de la motivation pour faire ce billet vient de vouloir publier un billet en novembre pour éviter un trou disgracieux dans mes archives, et avant cette limite je n'ai trouvé le temps ni de finir un de mes autres billets sur le feu ni prendre de l'avance sur le centième cliché.

Cela dit, le gros la motivation pour coucher ces lignes maintenant vient de l'espèce de crise de foi que je traverse dans ma relation avec 52frames, et dont j'aimerais garder une trace.

Je n'ai jamais eu une relation très claire avec le loisir photographique, et ça fait depuis si longtemps que je n'ai plus les souvenirs très clairs sur sa nature à différentes périodes.

Je me souviens clairement que j'ai acheté mon premier appareil photo numérique pour des raisons purement utilitaires, comme j'utilise le capteur photo minable intégré au smartphone aujourd'hui. J'avais donc opté pour un compact Sony bas de gamme, probablement vers 2006 parce que je plaisantais sur le rootkit de la même marque.

J'ai commencé à imaginer des possibilités de photographie en tant que loisir artistique un peu avant d'acheter mon premier reflex en 2011.

J'ai rapidement été conquise par le côté technique du loisir, mais je n'arrive pas à me défaire de l'idée que le côté artistique reste abyssalement mauvais.

En tout état de cause, j'ai relativement peu pratiqué, avec 3708 déclenchements pendant le dixième anniversaire de ce reflex. J'avais ouvert le photoblog sur ce site dans l'espoir de pratiquer plus, mais c'était un échec retentissant, avec douze entrées en cinq ans.

Je voulais pratiquer pour progresser, parce que je me considérais (et je me considère encore) comme débutante. J'avais identifié deux obstacles majeurs :

D'une part, la photo m'enthousiasme moins que la plupart des autres choses que je peux faire chez moi, donc je ne sors pas naturellement pour la pratiquer (j'ai d'ailleurs le même problème avec la moto, et j'ai plusieurs fois imaginé faire les deux dans la même sortie mais ça ne s'est encore jamais produit).

D'autre part, je manque cruellement d'inspiration. Il m'arrive de remarquer des prises de vues intéressantes « par hasard », mais je les remarque longtemps après l'occasion de faire la photo, donc même avec un appareil photo dans les mains je ne pourrais rien faire. Et pour construire des photos intéressantes, je suis submergée par les possibilités et incapable de faire un choix.

C'est en pensant à ce dernier point tout en voyant 52frames chez Balise que je me suis inscrite sur 52frames début 2022.

Le principe de 52frames est qu'ils donnent un thème chaque semaine, et il faut poser une seule photo, prise la semaine en question, sur le thème en question, avec éventuellement un défi supplémentaire si le thème est trop facile ou trop vaste.

En se limitant à une seule photo par semaine, l'investissement en temps n'est pas colossal, et la régularité est plus valorisée que la performance ponctuelle, donc ça avait l'air parfait pour ma vie de pas-si-passionnée qui veut progresser.

Et dans l'ensemble, ça a plutôt bien marché : au moment où j'écris ces lignes, la série tient toujours, nous sommes bien dans la centième semaine depuis mon inscription, et j'ai l'impression d'avoir progressé sur plus axes techniques.

L'expérience de ce loisir a même longtemps été très positive, en juin dernier je parlais encore de progresser « techniquement comme hédonistiquement », dans la photographie amateur. Ça ne fait que depuis plusieurs semaines, ou peut-être quelques mois, que je continue la série plus par devoir que par plaisir. Coïncidemment, ça fait depuis à peu près la même période que ma vie est beaucoup plus chargée et tous mes autres loisirs ont pris aussi un coup.

J'en suis cependant au stade où je me demande vraiment combien de temps persister dans un loisir qui n'apporte plus l'étincelle de joie.

Pour ne rien arranger, quand je regarde l'évolution de mes entrées de photoblog, je n'ai pas l'impression que la progression technique se traduise par une progression artistique.

Je sais que c'est un peu nul de conditionner sa pratique d'un loisir à l'évaluation des pairs, à plus forte raison quand cette évaluation est artistique ; mais en même temps je peux plus facilement serrer les dents le temps d'un passage à vide si j'ai l'impression de progresser vers un objectif qui me tente.

Dit autrement, si mes photos ne suscitent pas d'étincelle de joie chez quelqu'un d'autre, si l'intérêt technique s'est usé chez moi, et si ma vie est trop chargée pour tous les loisirs que je veux faire, est-ce qu'il ne vaudrait pas mieux regarder les choses en face et laisser tomber ce loisir ?

Commentaires

1. Le vendredi 1er décembre 2023 à 17:48, par Balise :

J'ai pété mon streak 52 frames l'an dernier juste avant les 3 ans pour le même genre de raisons : le projet lui-même ne m'enthousiasmait plus vraiment, et plus je gardais mon streak, plus il était dur à péter, et plus ça devenait une obligation.

Après un an de pause, je suis en train de caresser à nouveau l'idée de rattaquer ça en janvier.
Et je crois que c'est comme ça que je gère plus ou moins tout ça : j'ai assez peu de choses que j'ai abandonnées avec 0 espoir d'y revenir. J'ai beaucoup de choses en pause plus ou moins longue, consciemment ou non, et... ça reviendra, ou pas.

Mais oui, un hobby qui n'apporte plus/pas de joie, faut peut-être le mettre en pause le temps que ça revienne... ou pas. La décision d'"abandonner" me paraît trop définitive en général :)

2. Le vendredi 1er décembre 2023 à 17:50, par Balise :

Ah, et si je reprends 52Frames, je crois que je vais prendre l'approche que je soumets juste pas la semaine "portrait of a stranger" si elle arrive. Et puis c'est tout. Et ça fera pas de streak, et ça sera pas un drame.

3. Le dimanche 10 décembre 2023 à 15:57, par Natacha :

Merci beaucoup pour le partage de ton point de vue !

J'ai une relation compliqué avec les systèmes de streak,j'ai déjà même fait un billet entier là dessus et je n'ai pas trop changé depuis.

Je dirais que le fond du problème est que je suis trop « tiède » vers le hobby photographique, je n'ai pas assez de passion pour revenir après une pause, et j'utilise le streak comme levier pour passer les moments les plus chiants.

Si je fais une pause quand ça devient trop chiant, j'abaisse le seuil de chiantise pour la prochaine fois, et c'est comme ça que je fais des pauses de plus en plus longues et fréquentes jusqu'à abandonner complètement. Si c'est aller inexorablement dans ce sens, j'ai plus envie de gagner du temps et sauter directement à la destination.

Sur le fond je trouve évident qu'il faut mettre en pause un hobby qui n'apporte plus/pas de joie, dans la pratique tous les hobbies ont leurs moments chiants, qu'il faut encaisser comme un investissement pour plus de joie future… d'où les questions sur les niveaux de risque et de rentabilité de cet investissement hédonique (et le streak n'est qu'un moyen pour concrétiser cet investissement).

Je suis dans une période où ma vie « déborde », je n'ai pas le temps de faire tout ce que je veux faire, et les loisirs tièdes sont un endroit logique par où commencer à dégraisser l'emploi du temps.

J'ai évoqué l'audience dans la fin de mon billet, c'est une autre source de motivation que le streak. Je ne sais pas à quel point tu y es sensible, mais au cas où, j'arrive à suivre beaucoup plus facilement ta production photographique dans 52frames que dans les scavenger hunts, qui vont beaucoup trop vite pour moi.

4. Le dimanche 10 décembre 2023 à 19:33, par Balise :

L'audience, c'est une question compliquée. Oui, c'est sympa d'avoir des gens qui suivent et qui commentent et tout, mais je sais qu'il y a aussi une part non négligeable d'audience "silencieuse" - des gens que tu sais même pas qu'ils savent qui tu es/ce que tu fais, pis tu les croises dans un autre endroit ou IRL, et ils te font un "ah mais j'aime bien ce que tu fais" (genre ça m'est arrivé la semaine dernière de manière assez inattendue sur AlphabeticalZürich).

Quand elles s'y prêtent (et elles peuvent souvent s'y prêter), mettre les photos sur Wikimedia Commons marche bien pour moi aussi - si j'ai une photo occasionnellement qui se retrouve utilisée sur une page de wiki, ou que quelqu'un réutilise pour illustrer un truc (j'ai tendance à préférer les licences permissives), c'est un coup de boost non négligeable !!

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  • Publié le 30 novembre 2023 à 23h25
  • État de la bête : pleine de peur, d'incertitude et de doute
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