La Suisse, elle t'aime ou elle te jette

En réalité, la Suisse n'a rien à voir dans tout ça. C'est juste que pour le présent billet, qui est le symétrique de La France, tu l'aimes ou tu la quittes, j'ai voulu conserver la symétrie dans le titre, au détriment de la rigueur historique.

Car en réalité, ce n'est pas la Suisse m'a jetée, mais mon employeur.

Note importante : pour ceux d'entre vous qui savent qui était mon employeur, merci de ne pas le nommer, ni d'y faire allusion quelqu'en soit la subtilité. Les blessures sont encore trop fraîches, j'ai encore des authentiques envies de meurtre au moment où j'écris ces lignes, et donc tout sel est banni de ces pages, pour éviter qu'il n'entre en contact avec une zone trop à vif. Tenez vous-en à « employeur » avec au besoin un possessif adapté. Merci d'avance.

Le lecteur attentif aura très certainement remarqué la faible fréquence de mise à jour de ce site depuis deux mois (environ ; principe d'incertitude, tout ça,…). Voici un commencement d'explication.

Il se trouve que j'ai eu la malchance de tomber sur un manager qui a décidé que je ne suis pas assez bonne pour ce boulot, et qu'il n'allait pas se laisser contredire par quelque chose d'aussi secondaire que la réalité. J'en serais presque à le soupçonner d'avoir inspiré le sujet de bac' de philosophie « Peut-on avoir raison contre les faits ? », en étant l'incarnation de la réponse positive à cette question.

J'avoue ne pas avoir la moindre idée de comment il en est arrivé là. Une explication de la chaîne causale qui a conduit à une telle catastrophe monumentale serait une des meilleures choses qui puissent m'arriver à ce stade, en permettant une closure propre, pour tourner la page avec autant de sérénité que la situation le permet. Mais manifestement, je ne vaux pas assez pour y avoir droit…

Bref, toujours est-il que mes évaluations trimestrielles ne se sont pas bien passées tout au long de l'année 2011. C'était peut-être mérité pour le premier trimestre, ma « performance » énormément souffert de quelques erreurs qui sont tristement évidentes avec le recul ; en résumé j'ai perdu beaucoup de temps en apprenant à travailler avec du code dont je n'ai pas écrit la totalité des lignes, et qui n'arrête pas d'évoluer à mon insu. Il m'a fallu du temps pour comprendre, et ça a effectivement été un handicap significatif à l'échelle du trimestre.

Je me demande si c'est à ce stade que mon manager a acquis des préjugés ou une haine contre moi. Ou peut-être qu'il a toujours été complètement déconnecté des réalités techniques autour de ce que je faisais… Bref, je n'ai aucune idée de ce qui a pu causer une aussi mauvaise évaluation au deuxième trimestre, en tout cas ce n'est certainement pas la réalité technique.

Alors le 6 août, il m'a fait entrer dans une espèce de plan de redressement des performances. Qui était, autant le dire tout de suite, une vaste blague. Il n'y a eu ni aide, ni amélioration, ni rien. Et ce contrairement à ce qui était annoncé, hein. Concrètement, il m'a collé sous le nez un état des lieux de mes performances, qui était à des années-lumières de ce que n'importe qui de censé qualifierait de « réel », avec un jeux d'objectifs tout aussi délirants à finir avant le 28 septembre, avec la menace floue de peut-être se retrouver à la porte.

Sans grande surprise, je n'ai pas réussi à accomplir l'impossible. J'y ai mis tout ce que je pouvais, j'ai sacrifié presque tout mon temps libre (je n'ai gardé que les week-ends, et pourtant sur la fin ça ne suffisait pas à ne pas me rendre folle). Sur cette période là, je ne dois pas avoir été loin d'être au dessus des trois quarts du reste de l'équipe.

Mais comme les objectifs impossibles n'étaient pas atteints, et que le manager a raison contre les faits, je me suis fait jeter dehors immédiatement. Administrativement je suis encore employée jusqu'au 31 octobre, pour respecter le mois de préavis prévu par mon contrat, mais avec l'avenant qui va bien qui me décharge explicitement de toutes les responsabilités et de tout les devoirs (à l'exception de la confidentialité) que je pourrais avoir envers eux, à compter du 28 septembre (ce qui est bien pratique, parce que sans accès au bâtiment ni à la moindre ressource informatique professionnelle, je ne vois pas comment j'aurais pu faire quoi que ce soit).

Et depuis ce jour maudit, j'ai passé mon temps à pleurer, dormir, et faire le nécessaire pour rejoindre mon copain en France.

Pour ceux qui découvrent cette nouvelle (je leur présente d'ailleurs toutes mes excuses), cela veut dire que vous pouvez rayer toutes les coordonnées non-informatiques que vous avez sur moi : mon numéro de téléphone portable français a expiré depuis un bon bout de temps, mon numéro de téléphone portable suisse était en fait mon téléphone de fonction, qui a disparu avec mon emploi, et mon adresse va changer dans les semaines qui viennent.

Une fois bien avancée dans mon retour au pays de l'HADŒPI, du minitel, de la droite sécuritaire et du petit excité, où les recruteurs jettent mon CV à la poubelle sans me donner la moindre chance d'entretien, il va falloir passer à la recherche d'emploi, qui s'annonce très très très mal.

Je posterai ici aussi mon offre de travail dès qu'elle sera au point (qui va probablement être la version professionnelle des mes négociations au rabais, de l'idéal inatteignable jusqu'au poste de caissière à mi-temps qui m'attend), mais si en attendant vous voyez passer un poste de sysadmin Unix (idéalement BSD, même que ma certification est encore valable) ou de développement système et/ou de qualité (idéalement en C ou en Ada, des échantillons gratuits seront Bientôt™ disponibles), pensez à moi. À vot' bon cœur…

Commentaires

1. Le lundi 10 octobre 2011 à 12:16, par AlexB :

Salut à toi,

Je fais parti du groupe Bull, avec des contacts dans quelques coins bien placé de la boîte. Bull est un groupe orienté "constructeur" et "R&D", pas comme toutes ces SSII qui brade les bouts de cervelles de ses escl... euh, employés.

Bull recrute, et je pense que tu peux faire parti des intéressés. Si c'est le cas, n'hésitez pas à m'envoyer ton CV, je verrais où je pourrais envoyer ça après (au mieux de ton profil).

Ah j'oubliais, je ne suis pas RH quand même. Toujours bon à savoir qui a-t-on en face de soi ;)

2. Le lundi 10 octobre 2011 à 12:36, par Natacha :

AlexB, je trouve ça assez amusant que le premier commentaire ici parle de Bull, qui a été le premier (et le seul) à refuser explicitement de m'embaucher [http://instinctive.eu/weblog/02D-premier-longue-serie], les autres n'ayant même pas pris la peine de répondre.

Bizarrement, j'ai du mal à croire que ça se passe mieux cette fois-ci…

3. Le lundi 10 octobre 2011 à 21:55, par un anonyme :

Ton manager doit instinctivement appliquer les bonnes méthodes d'ascension interne explicitées dans le GUIDE PRATIQUE POUR RÉUSSIR SA CARRIÈRE EN ENTREPRISE Avec tout le mépris et la cruauté que cette tâche requiert

Pour apprendre à être un véritable manager, c'est par ici :
[http://www.editions-zones.fr/spip.php?article62]

4. Le lundi 10 octobre 2011 à 22:08, par Tigre :

Sans vouloir vexer personne, ni faire de mal à qui que ce soit, je crois que parfois, il faut sortir d'une situation pour pouvoir l'appréhender proprement. Ca va faire banalité, comme ça, mais peut-être trouveras-tu largement mieux ailleurs, et pourras alors t'épanouir au point, peut-être, de revoir cet évènement comme une "chance". A toi, maintenant, de saisir l'occasion et de la transformer en véritable chance. C'est ainsi qu'on réussit sa vie. Même si, tant que tu as le nez dedans, ça pue la catastrophe. Si le recul était immédiat, ça aurait un autre nom, c'est évident. Sache enfin que d'après ce que je constate, tu n'es pas seule. Et dans le fond, c'est ça l'essentiel.

5. Le mardi 11 octobre 2011 à 9:02, par Emmanuel :

Bon courage, Natacha.

6. Le mardi 11 octobre 2011 à 10:31, par Damien :

Bonjour,

Sur Lolix, il y a quand même beaucoup d'offres qui sont publiées ; lors de tes recherches, cela n'avait vraiment rien donné ? Je te conseille de regarder les archives de ces dernières semaines (en général le processus de sélection dure au moins 3 semaines si le besoin n'est pas urgentissime)...

Sinon, là où je travaille, je peux sans doute me renseigner mais c'est de l'admin Linux, pas BSD. Par contre, il y a 3000 machines donc c'est assez intéressant et l'ambiance est très bonne. J'ai également encore des contacts dans les entreprises où j'ai travaillé auparavant, notamment pour du développement C. Sinon, on peut en parler en privé, mais est-ce qu'animer des formations pourrait t'intéresser ? Si c'est la cas, j'ai éventuellement aussi des pistes...

Tu peux me contacter par mail si tu le souhaites.

7. Le mardi 11 octobre 2011 à 14:58, par Fred :

Bon,
oublions tout de suite le passé tragique dont tu es la victime et tournons nous vers l'avenir !! ;)
Tu cherches dans une région particulière ? Tu veux continuer dans le métier fabuleux du développement ou tu préfères faire de l'admin ?

8. Le jeudi 13 octobre 2011 à 7:53, par Nimue :

Et si malgré tout tu n'arrives pas à retrouver dans ces domaines, n'oublie pas la fonction publique !
Rien ne t’empêche de passer des concours et de refuser le poste si entre temps tu as trouvé mieux. ça reste une roue de secours tout à fait honnête : une fois le concours passé, on te forme à ton boulot, d'autant que tes années d'ENS peuvent être récupérée en matière d'ancienneté.
Et la saison des concours démarre bientôt !

(Oui, je prêche pour ma paroisse, mais c'est la seule qui ne fait pas de délit de sale gueule : seul le concours compte.)

9. Le jeudi 13 octobre 2011 à 12:06, par Natacha :

Je ne sais pas trop quoi penser de la contribution du commentateur anonyme, le contenu fait un peu penser à de la pub' déguisée, mais tout le reste semble légitime, donc je laisse le bénéfice du doute. Dans le cas où son était sincère et pensait avoir contribution positive, l'environnement professionnel dans lequel j'étais ne correspond pas du tout à ce que cet ouvrage suggère. Il s'est certainement passé des choses perverses, et depuis que j'ai découvert que je ne suis pas sa première victime, je soupçonne qu'il y a vraiment quelque chose de pourri dans ce royaume. Celà étant, ces manœuvres ne lui ont procuré aucun bénéfice direct, ni en terme de carrière ni en termes de pouvoir interne ni en termes de copinage. Ça a même été une légère perte objective pour lui. Je ne sais pas tout ce qui se trame, mais je sais avec certitude que ça ne se résume pas à ça.

Tigre, cette version téléoscopique (dur à Googler comme mot, j'espère que ma mémoire de sa définition est bonne) me dérange quand même beaucoup. Un peu comme un mélange de confirmation a posteriori et de « la fin justifie les moyens » promu en philosophie ou en façon de vivre. Il me semble injuste d'utiliser le futur réel pour justifier une catastrophe, alors qu'il me semble plus pertinent d'utiliser la gerbe de tous les futurs possibles.

Bref, en termes plus simples, effectivement « à quelque chose malheur est bon », on peut avoir de la chance dans son malheur, etc, mais ça n'enlève rien à l'ampleur du désastre. Ce qui ne me tue pas me rend plus forte, et si effectivement ça ne me tue pas j'en ferais ce que je peux en faire de mieux. Le recul ne sert pas réécrire ou réinterpréter le passé, mais seulement à tirer des leçons pour le futur.

Enfin au moins on se rejoint sur les deux dernières phrases : cette catastrophe professionnelle, que j'empire méchamment en ne restant pas en Suisse, est l'occasion de me concentrer sur mon couple. Je continue de placer mon épanouissement émotionnel et sentimental avant ma réussite professionnelle, et je reste certaine que c'est la meilleure chose à faire pour mon équilibre personnel. Chacun ses priorités.

Emmanuel, merci beaucoup.

Damien, je n'avais pas utilisé Lolix à l'époque, mais je n'ai candidaté qu'à des offres qui existent (pas de candidatures spontanées au petit bonheur la chance), et ça n'avait vraiment rien donné. La seule qui a marché, c'était un ami qui m'a recommandée en interne (après mon accord) dans la boîte qui m'a finalement embauchée, mais ce n'était pas vraiment de mon initiative personnelle.

Je n'en suis pas encore tout à fait au stade de chercher activement, un autre billet ici décrivant ma situation et mes aspirations en marquera le début. Je risque fort de te contacter en privé à ce moment là. Mais pour répondre rapidement, je suis d'accord pour administrer de l'unix, la particularité de BSD est juste que j'ai beaucoup plus d'expérience personnelle dessus, et une certification pour le prouver. Et animer des formations fait partie des choses qui ont de bonnes chances de me plaire et pour lesquelles je pense avoir des qualités. Avec en plus de l'enseignement universitaire dans mon CV [http://instinctive.eu/weblog/004-pedagogie].

Fred, je vais continuer à spoiler mon prochain billet : oui, je cherche dans une région particulière, l'Île de France. Je vais chercher aussi bien dans le développement que dans l'administration système (probablement pas réseau, je n'y connais vraiment pas assez), ainsi que probablement hors de l'informatique. J'ai probablement un meilleur niveau en développement qu'en administration, mais j'y suis aussi plus exigeante (faute de quoi ledit niveau s'effondre).

Nimue, j'ai bien l'intention de regarder de ce côté là. Et mon CV pourri à la “jack of all trades, master of none” me permet au moins d'espérer avoir des chances à une large gamme de concours. Et peut-être même que mes années d'allocataire de recherche peuvent aussi être récupérées. Par contre je vais un peu nuancer le délit de sale gueule : ça n'en fait certes pas à l'entrée, mais ça en fait ensuite : [http://www.lesnouvellesnews.fr/index.php/civilisation-articles-section/parite/1404-inegalites-salariales-persistantes-dans-la-fonction-publique].

10. Le samedi 15 octobre 2011 à 14:37, par FrnchFrgg :

Bon, la bonne nouvelle c'est qu'elle était injustifiée ton impression d'être nulle que tu avais à notre dernier contact téléphonique (qui m'a couté 150€ un bras une jambe ;-) ). Sinon, je compatis, je sais ce que c'est d'avoir un patron qui met des bâtons dans les roues (c'est pas récent, tout va bien en ce moment) même si je n'ai certainement pas vécu aussi difficile que toi.

Je comprends aussi que tu en veuilles à ton ex-employeur, mais je suppose qu'il n'est pas plein de managers cons (savoir ça ne change pas grand chose je te l'accorde, ce connard t'a malheureusement grillée dans cette boite je pense).

Ça me fait penser qu'on avait envie de passer te voir, ben finalement ça se fera à Paris hopefully, ce qui n'est pas si mal parce que Zurich c'est peut-être pas si loin à vol d'oiseau mais c'est vachement long de chez moi.

Courage.

Bisous, Julien

11. Le vendredi 21 octobre 2011 à 16:58, par Nimue :

Je pense que l'article parle de la fonction publique territoriale. (faut pas y allez, là bas)
La fonction publique d'état, ça, c'est la classe !
La rémunération est selon ta catégorie (qui dépend du niveau d'étude lié au concours passé) et de ton grade (niveau d'indice de la paye : indice 300 c'est 300x le point d'indice, qui est à 4euros et des brouettes, par exemple)
je gagne pareil, primes comprises (puisque calculée sur les mêmes bases) qu'un petit camarade masculin au même indice que moi. :)

(Ok, c'est pas clair, mais en gros, moi j'ai pas vu ces fameuses inégalités)

12. Le vendredi 21 octobre 2011 à 17:01, par Nimue :

Ah, j'avais pas vu que ça visait spécialement la fonction publique d'état. (pas douée).
Enfin, pour une fonctionnaire d'état titulaire sur un poste en adéquation avec son statut, je n'y crois quand même pas.

13. Le mercredi 2 novembre 2011 à 13:01, par Natacha :

FrnchFrgg, effectivement, les managers cons doivent être une minorité chez mon ex-employeur. D'après les informations que j'ai, ils seraient quand même nettement plus nombreux là où j'ai travaillé qu'ailleurs. Ce qui n'est pas forcément super rassurant, mais qui donne plus de chances de faire remarquer une anomalie systémique à la couche supérieure. Il y a très peu d'espoir pour moi, mais il n'est pas complètement impossible que les choses se retournent en ma faveur.

Nimue, j'ai l'intuition que dans la fonction publique comme ailleurs, plus on monte haut dans la pyramide plus les inégalités se creusent. Avoir des « petits camarades » comparables veut dire que ça concerne assez de monde pour être plutot bas dans cette pyramide. Les possibilités de discrimination (consciente ou non) sont beaucoup plus fortes lorsqu'il n'y a aucun point de comparaison.

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  • Publié le 10 octobre 2011 à 11h34
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