In memoriam

Alors que l'année 2019 se termine, je vois passer moult rétrospectives et bilans, quoiqu'un peu moins qu'à l'époque florissante des blogs. Et comme chaque année, j'essaye de me prêter à cet exercice, et je reviens bredouille, ce qui est intéressant est déjà dit et ce qui n'est pas dit n'est pas intéressant ou pas conforme à ma ligne éditoriale.

Il y a pourtant un évènement de 2019 qui m'a fait partir sur des réflexions intéressantes qui n'ont pas été transcrites ici et qui pourraient l'être, et qui concerne en gros ma relation avec des gens exceptionnels, et un peu mes relations avec les autres sortes de gens.

Je vais volontairement rester vague, d'un part parce que je n'ai pas eu l'accord de ces gens pour parler d'eux, et dans le cas 2019 je suis même sûre que ça ne lui plairait pas d'être identifié ; et d'autre part parce que les cas particuliers me semblent beaucoup moins intéressants à partager sur ce site que l'abstraction générale, à laquelle vous pourrez peut-être contribuer dans les commentaires.

Les gens un peu exceptionnels

J'imagine que quiconque ayant un peu vécu a pu socialement interagir avec un génie dans un domaine ou un autre. Ces génies sont des gens excellents dans un domaine particulier, et si on accepte tous les domaines, même les plus inutiles et les plus loufoques, ils ne sont pas vraiment rares dans la population.

Par exemple je me souviens d'un camarade de classe qui connaissait par cœur toute la généalogie des rois de France. C'est impressionnant quand c'est démontré au pied levé, mais avec un intérêt authentique et en y passant du temps, c'est à peu près à la portée de n'importe qui.

Il y a aussi des génies un peu plus impressionnants, parce qu'on a l'impression que même en y passant une quantité colossale de temps, n'importe qui n'y arriverait pas. Par exemple, j'ai rencontré quelqu'un avec une intuition mathématique telle qu'il manipulait les théorèmes de prépa' comme nous manipulerions des cubes.

Mais sans rien vouloir enlever de leur mérite, je crois qu'on se représente mal ce dont on est capable en y passant vraiment beaucoup de temps. Il y a un moment où l'entrainement et l'expérience font franchir des paliers qui ouvrent des possibilités que l'on imaginait pas avant. Ainsi par exemple, hors traumatismes (et que j'imagine plus fréquents qu'on le croit) et autocensure, je pense sérieusement que beaucoup plus de la moitié de la population est capable d'assimiler le programme de prépa' math' en vingt ans à temps plein.

Du coup, je trouve que ces génies qui ont passé beaucoup de temps sur quelque chose, avec peut-être quelques « facilités », sont finalement à peu près « normaux ». Ils ont fait des choix différents de vous et moi, et tant mieux si c'est à leur goût, mais ils restent « humains ».

Et du coup, ce n'est pas vraiment d'eux que je veux parler dans cette entrée.

Les gens vraiment exceptionnels

Quand on crée un personnage de jeu de rôle, on a typiquement un certain quota de points à répartir dans une liste de caractéristiques ou une liste de compétences.

Les points que l'on met en Force ne peuvent pas être mis dans la Dextérité, ou alors en privilégiant la Force et la Dextérité on se retrouve à mettre peu en Intelligence ou en Charisme.

De la même façon, passer beaucoup de temps sur quelque chose, comme décrit dans la partie précédente, c'est juste mettre tous ces points dans une seule compétence, et atteindre un niveau exceptionnel de ce fait.

L'idée de répartir comme ça des points donne un certain sens d'équilibre cosmique, tout le monde « vaut » autant et nous ne différons que par la répartition, aléatoire ou choisie, de cette « valeur » globale.

Quelque part, c'est effectivement le cas pour le temps : tout le monde a 168 heures à répartir chaque semaine, ce qui pourrait se traduire par un nombre fixe de points de compétence pour tout le monde.

Et puis parfois, on se retrouve face à des gens qui n'ont manifestement pas le même nombre de points que nous, avec par exemple un très haut score en Force et en Dextérité et en Intelligence et en Charisme et en Chance.

C'est d'eux qu'il est question dans ce billet.

Vivre avec

J'imagine qu'on peut se sentir floué par la destruction inopinée de son sens d'équilibre cosmique, et que la simple existence de ces gens peut produire moult émotions négatives.

Comme ma nullité extrême est un axiome fondamental, nécessaire à la cohérence de l'Univers, je trouve personnellement plutôt rassurant qu'il y ait des gens de l'autre côté du point d'équilibre pour compenser ma contribution.

Au contraire, ma réaction personnelle est plutôt de profiter de tout ce que ces gens-là acceptent de partager avec le vermisseau que je suis, pour m'aider à devenir chaque jour un peu moins nulle (l'absence d'asymptote n'étant pas garantie, il ne faudrait pas non plus abîmer la cohérence de l'Univers).

En fait exactement de la même façon que je profite volontiers de ce que les « simples génies » acceptent de partager avec moi, et même les « gens normaux », qui sont tous uniques et donc forcément exceptionnels par un aspect ou un autre.

C'est juste que ces gens-là ont naturellement plus à partager que les autres, et pour moi qui ne suis pas très douée en relations humaines, entretenir une relation avec une personne comme ça permet de progresser beaucoup plus, et plus largement, qu'avec une seule autre relation.

Quand il y a en plus une certaine bonté, ou au moins une certaine générosité, ainsi qu'une certaine compatibilité de caractère, ça rend la relation très précieuse, et ça donne envie de faire des efforts que je ne ferais peut-être pas pour d'autres personnes.

Et quand ces efforts échouent, ça attriste d'autant plus, au point de faire un billet avec un titre macabre alors qu'il n'y a pas mort d'humain.

D'un autre côté, il y a peut-être quelque chose de pourri dans mon point de vue, à compter les relations plutôt que les humains, et à ne pas distinguer les fins de relations suivant leur cause : la mort, le déménagement, la brouille, et tous les autres, se valent pour moi quand relation est détruite au même point.

Et puis je continue de ressentir un manque quand je n'ai pas de relation maître-disciple où je tiens le rôle du disciple, alors que pour les relations plus équilibrées, ou déséquilibrées dans l'autre sens, je n'y perds que la relation.

Miroir, mon beau miroir

Pour une raison obscure, je n'arrive pas à me limiter à mon propre point de vue, je le renverse systématiquement. D'où par exemple, la majorité de « mais qu'est-ce qu'il est con ! » qui sont chez moi suivis de « ah ouais mais je ne fais pas mieux ».

Évidemment, lorsqu'il est question des gens tellement plus exceptionnels que les « simples génies », je ne m'imagine pas une seconde en faire partie (vous ne voudriez pas non plus d'un Univers incohérent).

Cependant, quand j'ai exposé une base d'un brouillon de ces réflexions à un collègue, j'ai dit d'untel qu'« il n'est pas comme nous », il a fait remarquer, avec une jolie formulation que je regrette d'avoir oubliée, qu'il n'y a pas de « nous » vu l'écart entre lui et moi.

Alors je ne vais pas m'avancer sur la réalité de ces considérations (cohérence, Univers, tout ça), parce qu'il est question ici de perception, pas de réalité.

Bon, ça reste quand même difficile d'imaginer un Univers distordu au point que je puisse être perçue comme faisant partie de ces gens qui ont trichoté en remplissant leur feuille de perso', mais admettons. Hypothétiquement.

Qu'est-ce que je peux faire de ça ?

La base, ce serait de faire aux autres ce que j'aimerais qu'on me fasse, mais en l'occurrence ça ne changerait rien à mon comportement actuel, ce qui ne donne pas l'impression d'être une leçon très utile. Il doit bien y avoir une autre conclusion à trouver derrière ça…

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  • Publié le 31 décembre 2019 à 12h20
  • État de la bête : tournée vers le passé
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  • Tag : Humeur
  • Tag : Réflexion
  • Tag : Social

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