Journal d'une apprentie motarde, leçon n°15

Dans la leçon précédente, je me plaignais surtout du manque d'endurance musculaire après la grande pause. Au cours de cette leçon, j'ai constaté une nette amélioration, même si je n'ai pas encore complètement récupéré : très peu de courbatures dans les adducteurs après la leçon, encore un peu de crispation dans la main droite à la fin des trajets entre école et plateau ; mais plus aucune erreur causée par la fatigue musculaire ou le manque d'entraînement.

Je me plaignais aussi de ne pas retrouver les sentiments positifs envers la moto pendant les trajets, et cette fois j'en ai retrouvé une trace, comme si ça mettait encore plus de temps à revenir que la mémoire procédurale et que l'endurance musculaire. Je ne sais pas du tout expliquer pourquoi.

Comme tous les exercices me semblent au point à l'exception de l'évitement, j'ai surtout fait des évitements pendant cette leçon. Cette fois je les ai bien comptés, et je suis arrivée à en faire 32, et je n'ai raté que les n°6, 7, 10, 15, 16, 19, 21, 26, tous de la même façon, en envoyant voler le cône de tête du mur à éviter. Tous les autres étaient parfaits, à l'exception du n°29, qui m'aurait valu un « B » à l'examen car j'ai posé le pied à deux reprises au cours du demi-tour. Comme pour le parcours lent, je considère le « B » comme étant une réussite, parce que j'aurai probablement assez de « A » par ailleurs.

En termes purement numériques, je suis donc passée de six réussites sur dix la dernière fois, à plus de sept réussites sur dix cette fois-ci, il y a donc un progrès clair.

En termes pratiques, le progrès est manifeste sur toutes les erreurs en dehors de l'évitement lui-même : sur tous ces parcours, je n'ai aucun demi-tour trop large, aucun ratage de la troisième vitesse, et aucun slalom effectué trop lentement. J'ai même pris confiance dans mon slalom, au point de subir des remarques parce que je vais trop vite, lorsque le radar m'a enregistrée à 48 km/h.

Il paraît que le slalom au-dessus de 45 km/h est dangereux, de même que la ligne droite au-dessus 55 km/h, mais je n'ai pas réussi à obtenir de détails sur pourquoi. Sur le coup, on m'a dit je risque d'avoir une mauvaise trajectoire, mais dans toutes mes 32 exécutions de l'exercice, j'avais toujours l'impression d'être large, et de pouvoir freiner tranquillement entre le slalom et le demi-tour (souvent même sans utiliser le frein avant). Une autre fois, on m'a parlé de la qualité du revêtement, sans plus de détail ; est-ce un problème d'adhérence, de gravillons, de bosses, ou autre chose ?

La différence entre ces deux possibilités, c'est que dans un cas c'est une question de niveau personnel, et si je sens bien que j'ai moins de marge à 48 km/h qu'à 42 km/h, j'en sens encore une quantité confortable ; alors que dans l'autre cas j'ai joué à la roulette russe sans m'en rendre compte, et c'est tout de suite beaucoup plus inquiétant.

Bref, pour en revenir aux évitements, ça fait depuis avant la leçon n°12 que j'ai l'impression que tout va bien si j'arrive juste à me retenir de regarder le cône à éviter, et à chaque fois que je le fixe, ou que j'y jette même un tout petit coup d'œil de rien du tout, je l'envoie voler. Je suis d'ailleurs passablement surprise de la précision que j'arrive à avoir dans cet échec, pour avoir systématiquement la roue avant dans la vingtaine de centimètres du cône.

Je me disais que la moto va où on regarde, et il faut juste se déconditionner à regarder l'obstacle, et il n'y a qu'à bosser ça. Sauf que c'est très compliqué de juste « ne pas regarder », il faut se conditionner à regarder autre chose. Je n'aime pas compter sur un gros cône soigneusement placé, parce qu'il ne sera pas là pour l'examen. J'ai un succès relatif en essayant de fixer la zone d'arrivée, mais c'est pratiquement la seule fois où je fixe quelque chose à moto, j'ai en général un regard mobile. Et vu le peu de choses pertinentes autour de l'évitement, le regard mobile va naturellement inclure un petit coup d'œil fatidique sur le cône à éviter.

Du coup, ce ne fut pas sans surprise que j'ai entendu un moniteur d'une autre moto-école me dire que je rate parce que je déclenche mon évitement beaucoup trop tard, et qu'il faudrait que je commence à pousser sur le guidon au moins un mètre plus tôt, ce qui n'est pas rien sur une distance de sept mètres.

On m'a toujours dit qu'il faut déclencher l'évitement lorsque le corps est au niveau de la fin du couloir d'évitement, alors que ce moniteur me disait de commencer à pousser sur le guidon à l'entrée du couloir.

Comme je n'ai jamais bousculé de cône du couloir d'évitement, je me suis dit que je n'ai rien à perdre à essayer. J'ai pu faire cinq évitements comme ça avant la fin de la leçon, et ils ont tous été de francs succès. Ce ne sont pas les instructions officielles, je retrouve partout qu'il ne faut tourner qu'à la fin du couloir, tant que ça marche pour moi…

On ne m'a évidemment pas laissé enchainer 32 exercices d'évitement de suite, j'ai dû entrecouper ça de quelques passages sur les parcours lents, d'une paire de freinages d'urgence, et même une pause pour expliquer des vérifications à un condisciple.

Tous ces exercices sont tellement au point que je ne les ai pas trouvés très intéressants. Il y a un parcours lent que j'ai eu l'impression de vraiment expédier, et en fait j'ai été chronométrée à 21.96 secondes, donc encore largement au-dessus du seuil de la note maximale.

Et il y a un morceau du parcours lent que j'ai raté en renversant un piquet, dans la section avec un passager, parce que quelqu'un s'était lancé sur ce même parcours lent. Ça n'arrivera évidemment pas en condition d'examen, mais ça montre que je ne suis encore pas du tout à l'aise avec des gens près de ma moto, et avec une version très prudente du « près » puisqu'il y a plus de douze mètres entre mes piquets et la première porte.

Le résultat de tout ça, c'est que je suis contente de m'être battue pour avoir cette leçon en plus, comme ça j'ai encore une leçon pour vérifier l'idée de l'évitement déclenché plus tôt, avant d'être jetée dans le grand bain.

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  • Publié le 15 septembre 2019 à 19h21
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